Le nombre de cycles détruits chaque année n'est pas directement quantifiable, mais on peut en donner une approximation en tenant compte de l'évolution du parc de bicyclettes d'une période à une autre, et en y ajoutant le nombre de cycles neufs vendus sur cette même période, il est possible de déduire rapidement le nombre de cycles ayant «disparu» dont la majorité ont été éliminés dans les filières classiques de traitement des déchets, qu'ils soient collectés directement en déchèterie ou via des opérateurs de traitement spécialisés.
Chaque année, ce serait environ un million et demi de vélos qui seraient détruits !
Des panneaux de bois à l'effigie d'anciens coureurs du Tour de France, comme l'Allemand Jan Ullrich (à droite), dans les rues de Plancher-les-Mines (Haute-Saône), le 23 juin 2015. (PIERRE GODON / FRANCETV INFO)
Un bulldozer. Puis deux. Puis trois. Un jour d'octobre 2011, les habitants de Plancher-les-Mines (Haute-Saône) voient défiler les engins de chantier sur la route qui mène à la Planche des belles filles, la petite station de ski voisine, nichée dans un coin reculé, entre le Territoire de Belfort et le Pays des mille étangs. Dans ce village d'un millier d'habitants, le bruit se répand comme une traînée de poudre : "Il y a des pelleteuses, ils sont en train de détruire la station !"
Le mythe de "l'Alpe d'Huez de l'Est"
Station de moyenne montagne, avec des installations vieilles des années 1970, la Planche des belles filles n'a jamais rapporté un centime au conseil général, qui en est propriétaire. Les premiers habitants qui arrivent sur place, ce jour-là, sont virulents. On parle de saboter les bulldozers. Jusqu'à ce que le pot-aux-roses ne soit découvert : les travaux préparent l'arrivée du grand barnum du Tour de France, prévue neuf mois plus tard.
Jean-Claude Arens, patron du cyclo club de Froideconche, organisateur de la cyclosportive des Trois Ballons ainsi que du Raid extrême vosgien, à Plancher-les-Mines, le 23 juin 2015. (PIERRE GODON / FRANCETV INFO)
Si la Grande Boucle débarque dans ce coin méconnu de Haute-Saône, c'est (un peu) à cause de Jean-Claude Arens. Cet assureur dans le civil trace le parcours de la cyclosportive des Trois Ballons, la course la plus populaire dans l'est de la France, avec des pointes à plus de 4 000 participants. Entre 2000 et 2011, l'arrivée est jugée au sommet de la Planche des belles filles, un final exigeant pour qui a déjà 200 kilomètres dans les pattes.
Pour attirer le chaland, il n'hésite pas à vanter son final comme "l'Alpe d'Huez de l'Est"."Je mettais des pancartes dans les virages, comme dans les 21 virages de l'Alpe, raconte le rusé organisateur. Avec les noms des anciens vainqueurs, mais aussi des messages plus humoristiques, comme 'interdit de rouler à moins de 8 km/h', ou carrément de faux radars." L'information remonte aux oreilles de Christian Prudhomme, le patron du Tour, soucieux de trouver de nouvelles difficultés pour le peloton. Le secret doit être gardé, pour l'annonce du parcours une semaine plus tard, en présence des élus locaux.
"Soit on s'écrase, soit on remue la merde"
Sur place, la situation s'envenime. Les locaux se divisent entre ceux qui veulent tout miser sur le tourisme et ceux qui dénoncent le coût pharaonique de l'allongement de la montée par une pente à 14%, pour offrir un final plus spectaculaire à l'étape. "Si le Tour de France se jouait sur 400 mètres, ça se saurait", persifle Jean-Claude Arens, qui avait proposé une solution alternative, sans macadam supplémentaire.
"Soit on s’écrase, soit on remue la merde. C’est ce qu’on a fait", confie l'un des fondateurs des "Indignés de la Planche", l'association qui dénonce l'aberration économique du projet. "On a appelé les écologistes à la rescousse. Il n’y avait qu’eux pour avoir les reins assez solides pour aller en justice", reconnaît l'une des figures des Indignés, Marc Brunet, guide de randonnée.
Au tribunal, les arguments des opposants ne manquent pas. La zone bulldozerisée et dynamitée se trouve à la limite d'une parcelle classée Natura 2000, car zone d'habitation du grand tétras. Et les travaux ont commencé sans autorisation. Résultat : 1 000 euros d'indemnités pour une association de défense des oiseaux. Mais pas de remise en cause des travaux, qui continuent de plus belle. "Le conseil général nous a mis devant le fait accompli, déplore Philippe Châtelain, élu EELV de la région. La Haute-Saône est 83e sur 100 au classement des politiques écologiques du journal La Vie. Ici, on vit sur l'agriculture intensive et la bagnole. C’est une terre de mission pour les écologistes."
Chalet brûlé et ville fantôme
Quatre ans plus tard, où en sont les promesses du conseil général de développer le tourisme dans cette région enclavée ? Sur la route qui monte à la Planche des belles filles, quelques rares inscriptions à la gloire de Thibaut Pinot, originaire de la région, achèvent de disparaître du macadam.
Une inscription "Thibaut [Pinot] merci" inscrite sur la montée de la Planche des Belles Filles. (PIERRE GODON / FRANCETV INFO)
Des panneaux de bois représentant Lance Armstrong ou Jan Ullrich – des coureurs qui n'ont jamais monté la côte – jaunissent au bord de la route. Dans la montée, on croise une poignée de cyclistes. "C'est dur !", lâche l'un d'eux entre deux halètements. Au sommet, un grand parking, désert, en guise de cul-de-sac. La buvette de la station de ski est fermée. Le chalet, qui faisait office d'hôtel-restaurant, a brûlé en juillet 2014. Il ne reste que les fondations, et une pancarte"Le Tour de France à la Planche des belles filles, l'attraction universelle", derrière les barrières et les gravats. Unique point d'intérêt, une majestueuse statue de bois représentant les fameuses "belles filles", qui ont échappé aux invasions vikings, œuvre d'un artiste local.
La station de La Planche des Belles Filles, théâtre d'arrivées d'étape du Tour de France 2012 et 2014. (PIERRE GODON / FRANCETV INFO)
A Plancher-les-Mines, la première commune en contrebas, on attend toujours les fameuses retombées. Le visiteur est accueilli par des commerces fermés, parfois délabrés. Le marchand de journaux a récemment mis la clé sous la porte, tout comme le garage Renault. Une friche industrielle de cinq hectares est nichée en plein cœur de la ville. "Quand j'étais petit, 1 000 personnes venaient travailler tous les jours ici. Il y avait douze bars. Douze !, se souvient Michel Galmiche, le maire, natif de cette ville frappée par la crise économique depuis les années 1970. Ce militaire à la retraite, le cheveu coupé ras, confie son impuissance à redresser la situation. "Aujourd'hui, avec une capacité hôtelière de zéro et une offre de restauration proche de zéro, avec quoi voulez-vous que je retienne le touriste ?" De fait, les vélos qui passent ne s'arrêtent pas.
La cuvée du Tour de France tourne à la piquette
Le caviste de la ville – l'un des quatre commerces toujours en activité – arbore un vélo peint en jaune sur le toit de sa maison. Lui non plus n'a pas connu d'effet Tour de France. "On avait produit une cuvée Tour de France, un vin du Roussillon avec une étiquette spéciale, qu'on vendait 5 euros la bouteille. En 2012, on a vendu les 3 000 bouteilles. Mais en 2014, lors du second passage, il nous en resté beaucoup sur les bras."
Pour eux, le coupable, c'est "Vesoul". Vesoul, la capitale du département, à 60 km de là, dont le nom est prononcé avec le même mépris que celui affiché par une partie de la classe politique française quand elle parle de "Bruxelles". Vesoul, accusée d'avoir fait traîner les travaux du chalet, critiquée pour avoir retoqué les projets des locaux pour animer la station – comme celui d'un bikepark proposé par le patron du club de VTT local –, et qui privilégierait le ballon d'Alsace, même pour apprendre aux enfants de la vallée à skier. "Quand je pense tout le mal qu'on avait eu à trouver des vélos pour les accrocher sur le toit... soupire Marie-Paule, la caviste. On va finir par décrocher le dernier qui est en haut, et quand le Tour repassera, on n'organisera ni buvette, ni animation. On se bornera à regarder passer le peloton. A quoi bon ?"
A Vesoul, justement, Yves Krattinger, le président PS du conseil général, est conscient du problème. "La région du sud des Vosges est frappée de plein fouet par la désindustrialisation, et je comprends le sentiment d'abandon qu'éprouvent les gens. Le FN a fait des scores très élevés aux dernières départementales." Et s'il se félicite du succès de son plan pour relancer le tourisme au niveau départemental, il reconnaît que "Plancher-les-Mines n'est pas la mieux placée.D'autres stations du département, comme Belfahy, ont rebondi, et ont su attirer des touristes pour qu'ils y achètent leur résidence secondaire. Mais c'est plus ensoleillé."
"Je n'ai pas de baguette magique"
Il faut redescendre 15 kilomètres dans la vallée pour dénicher quelqu'un avec un t-shirt jaune vif, "I love la Planche des belles filles". Bruno tient le restaurant qui porte son nom, à Ronchamp, le long de la départementale. Dans son établissement trônent un maillot et des photos dédicacées de Thibaut Pinot. Cyclotouriste le dimanche, Bruno voit passer des cyclistes venus se frotter à l'ascension de la Planche. "Ça nous apporte un peu de monde, même hors saison, confie-t-il. Pour les Hollandais et les Belges, le Jura, ça vaut les Alpes, et c'est plus près." Le camping voisin est aussi à l'équilibre après des années difficiles.
Un cafetier de Champagney se montre moins convaincu : "Le Tour de France, ça ne me rapporte rien. Ce qui marchait, c'était la cyclo des Trois Ballons. Le café ne désemplissait pas pendant trois jours. C'était ma recette de l'année." La cyclosportive est partie au moment où le Tour est arrivé, à cause d'une bisbille entre les politiques locaux et l'organisateur, pour une subvention de quelques milliers d'euros. Une autre course a été lancée, sans le nom prestigieux, et mettra du temps à faire son trou chez les mordus de cyclisme.
Une chose est sûre : le chemin sera long pour faire de ce coin de Haute-Saône une Mecque du vélo. "Je n'ai pas de baguette magique, conclut Yves Krattinger depuis son bureau de Vesoul. Mais j'étais encore à Utrecht la semaine dernière avec Christian Prudhomme pour faire revenir le Tour à la Planche des belles filles, faire une étape 100% en Haute-Saône. Il faut que le Tour revienne tous les trois-quatre ans, qu'on la voie toujours sur les écrans."
Disputés sur les hauteurs de Muhlbach-sur-Munster, les championnats nationaux de VTT de la FSGT ont confirmé que l'Alsace est une terre de cette spécialité.
Vincent Brochot, champion de France, a mené la course dès le départ. PHOTO DNA – Julien. Kauffmann
En témoignent, les résultats des coureurs qui se sont disputés les titres de champion de France mis en jeu samedi. La première ascension donne le ton en seniors filles, avec un départ impressionnant des deux Alsaciennes, Émilie Sarron (Staffelfelden) et Estelle Fischer, suivies par Noémie Epin (Essonne, Seine-et-Marne Sud), classée première vétérane. Cette dernière comprend rapidement, après la fin de la première boucle, qu’elle ne pourra pas revenir sur les deux premières, qui se tiennent en deux secondes (31’11 contre 31’13), alors que la championne vétérane sortante, pointe déjà loin derrière (31’55).
Emilie Sarron championne de France
Après deux boucles, les écarts sont abyssaux et aucune des filles ne semble pouvoir inquiéter le duo qui file grand train sur ce beau circuit dans les hauteurs de Muhlbach tracé par le Munster Bike Club (MBC) et ses nombreux bénévoles. Le dernier tour ne change rien à la donne. Émilie Sarron franchit la ligne d’arrivée en 46’28, avec une confortable avance (+31s) sur sa seconde, Estelle Fischer. La nouvelle championne de France FSGT peut alors lever les bras au ciel avant de revenir sur les raisons de son succès. « Nous sommes parties vite devant. Je savais que je serais peut-être rattrapée dans la descente, qui est très technique, par les autres filles. J’ai ensuite géré sur le plat », explique la jeune femme de 31 ans qui signe son premier succès… pour sa première année de VTT.
La cadette, Chloé Harvelant, soutient la comparaison en passant la seconde boucle avec le meilleur chrono (30’). La jeune haut-rhinoise assomme la concurrence : sa poursuivante boucle son deuxième tour avec plus de deux minutes de retard (32’30). Son avance ne cesse de croître pour terminer au final avec plus de 5 minutes d’avance sur Chloé Scherrer, une autre haut-rhinoise. Pour la championne, « c’est un grand plaisir que de gagner ici, sur un circuit très physique, et cela me permet de préparer les championnats de France. »
Enfin, la course en tandem VTT a attiré sept équipages. Et encore une fois, c’est le Haut-Rhin qui glane les deux titres mis en jeu, grâce à la victoire du tandem Guyot-Warther (42’14) qui devance les locaux du MBC, Samuel Krieg et Jérémie Delgado (42’25). Mention spéciale pour Bertrand Schott et Bruno Criseo ainsi que pour Emmanuel Still et Bastien Braune, deux équipages composés de non-voyants, applaudis très chaleureusement à chacun de leur passage sur la ligne d’arrivée. Les premiers nommés terminant ainsi champion de France Handisport.
Vincent Arrigault septième
Hier, les jeunes se sont livrés un joli duel. Le clou du spectacle arrive avec les espoirs et les seniors rivalisant de vitesse. C’est le cas de Vincent Brochot (Essonne, Seine-et-Marne Sud), champion de France en 1’24’04, après avoir amélioré son temps au tour à chaque passage sur la ligne. Difficile pour la concurrence de s’accrocher, même si Thomas Mequignon semblait pouvoir tenir la distance. « Il a eu un souci technique, ce qui m’a permis de le distancer, raconte le vainqueur, et une fois tout seul, j’ai tout lâché. » Vincent Arrigault premier alsacien termine septième et semble satisfait de sa course. « Je reviens de blessure, donc ce n’est pas si mal, même si j’ai perdu la tête de course après le troisième tour… »
Du côté des espoirs, Yohan Benard s’impose en 1’24’08 (Seine-Maritime) et a été longuement poussé dans ses retranchements par Clément Trunet (Pas-de-Calais) mais le jeune espoir « a profité d’une chute de son poursuivant » pour s’imposer et rafler le titre.
Partie de rien dans les années 1990, la marque allemande Canyon a su doubler les grands noms du cycle avec un argument redoutable : faire du haut de gamme à prix cassé grâce à la vente sur Internet. Deux des équipes qui s'élanceront samedi pour la 102 e du Tour de France ont déjà adopté ses vélos.
Comme chaque année à la même époque, les marchands de vélos ont le sourire. Pendant trois semaines, la Grande boucle va faire office de publicité géante pour la petite reine. Mais, en ce début d'été, les gros revendeurs comme les patrons de boutiques spécialisées affichent une mine un peu crispée. Leur crainte : que les coureurs des équipes Movistar ou de Katusha gagnent un peu trop d'étapes ou, encore pire, le Tour... Car sous les selles des champions qui s'élancent samedi pour sa 102e édition (dont Nairo Quintana, qui a gagné le Giro l'an dernier) on ne trouve pas n'importe quels vélos… mais des Canyon. Une marque sur laquelle Cadel Evans est devenu champion du monde en 2009, et qui est aussi peu appréciée par les dinosaures de la pédale qu'Uber par les taxis, Airbnb par les hôtels ou Free par Orange. Parti de rien à l'aube du XXIe siècle, Canyon a rattrapé les échappés qui faisaient la course en tête depuis des décennies. Il a laissé sur place les grands noms de l'école italienne de Bianchi à Pinarello, il a atomisé les français comme Peugeot et fond maintenant sur les américains Trek, Specialized ou Cannondale, qui s'étaient affirmés comme les nouveaux empereurs du cycle.
Que ce soit sur route, en forêt ou en montagne, les vélos de Canyon sont bien partis pour devenir d'ici peu les numéros un, en Europe pour l'instant, du segment haut de gamme. Ces petits bijoux à plus de 600 euros pour lesquels les sportifs craquent comme des enfants pour des joujoux et qui font que, dans les pays occidentaux, l'univers du vélo est divisé en deux parts de valeur pratiquement égale entre, d'un côté, un marché de volume de vélos à petit prix, et, de l'autre, des vélos chers vendus en petite quantité aux aficionados. C'est à cette seconde moitié du gâteau que Canyon s'est attaqué. Et il est en train d'en manger une grosse part avec un argument redoutable : il casse les prix sur le premium. Pour une qualité comparable à celle de ses concurrents, l'allemand, qui a fait du made in Germany une arme de séduction massive, est près de 30 % moins cher. C'est un peu comme si demain quelqu'un débarquait sur le marché de l'automobile en vendant une Audi au prix d'une Logan ! « C'est le vélo dont tout le monde rêve au prix où on peut se l'acheter », aiment à répéter les salariés du groupe.
Pour réaliser ce tour de force, Canyon repose sur une idée simple exécutée avec talent : il vend ses deux-roues directement sur Internet en contournant la distribution classique. A l'image d'un Dell, qui, dans les années 1990, avait révolutionné la micro-informatique en vendant directement des PC qu'il assemblait à la commande, Canyon passe par le Net et livre sans doute autour de 100.000 vélos par an via UPS, en rendant à ses clients les euros de marge que ses concurrents reversent, eux, à leurs distributeurs.
Une machine à brevets
Une incroyable réussite qui est née, presque par hasard, de l'imagination de Roman Arnold, un géant de 2,10 mètres, qui a toujours aimé pédaler. « Dans les années 1990, Roman et son frère Frank faisaient beaucoup de vélo. Mais il avait du mal à trouver de l'équipement ou des pièces qui leur convenaient. Acheter par correspondance coûtait une fortune, du coup, avec leur père, les frères Arnold ont eu une idée, ils sont partis acheter directement leurs pièces en Italie et, pour se rembourser un peu, ils ont ramené des pièces et commencé à les vendre avec leur roulotte lors des courses cyclistes », se souvient Rodolphe Beyer, qui a créé Canyon France en 2005. Le petit business a prospéré. Les frères vendaient des pièces dans le garage de leur maison à Coblence le soir après l'école. Ils ont même fini par ouvrir un magasin de cycles. L'histoire aurait pu s'arrêter là, mais, « un jour, on a proposé à Roman un conteneur de cadres saisis par la douane. Il les a vendus en magasin et par catalogue. Il s'est rendu compte qu'il y avait une demande et il a fini par commander directement des cadres en Asie », se souvient Rodolphe Beyer. Sans s'en rendre compte, Roman a alors mis le doigt dans un engrenage, puisque, en commandant des cadres, il se plaçait en concurrence avec les marques vendues dans sa boutique. Le pari pouvait sembler fou, mais, inspiré par la bulle Internet, le cycliste devenu entrepreneur se dit qu'il peut être plus fort seul. La seconde étape majeure intervient en 2003. Roman le Germanique, né en 1964, finit par se rendre compte qu'en commandant des cadres il est à la fois faible et vulnérable. Faible, car il ne se différencie pas de ses concurrents, et vulnérable, car il suffit qu'il reçoive un lot de cadres défectueux pour qu'il se retrouve confronté à de gigantesques problèmes de garantie. Pour se différencier, Canyon, qu'il a créé, va donc faire le pari de la montée en gamme et va, pour atteindre son objectif, s'appuyer sur des universitaires, des ingénieurs, des chercheurs avec un seul objectif : faire le meilleur vélo au monde. Un pari que le groupe va rapidement remporter. Le vélo de série le plus léger, c'est eux, le vélo le plus rapide, c'est eux aussi. Depuis, le groupe, qui s'appuie sur une armée d'ingénieurs, est devenu une machine à déposer des brevets et à gagner des prix dans la presse spécialisée. Design, qualité et des prix qui s'étalent de 499 à 8.499 euros, tel est le triptyque de ce groupe, qui est le seul à scanner toutes ses fourches et ses cadres en carbone. « C'est une question de qualité et de sécurité, car on met des gars de 50 à 100 kilos sur des engins qui peuvent descendre des pentes à plus de 50 kilomètres/heure. C'est de la Formule 1 et ce n'est pas comme une raquette de tennis qui peut casser. Mais, c'est aussi notre intérêt car, quand vous livrez, vous n'avez pas envie de multiplier les retours pour défaut », explique Ward Grootjans, un Néerlandais qui a quitté son job de consultant pour prendre en charge la stratégie chez Canyon.
Pour aller plus loin, ce groupe, dont les effectifs ont doublé en cinq ans, mais qui ne compte toujours que 650 personnes pour un chiffre d'affaires qui a dépassé les 100 millions, et qui a dégagé un résultat de 3 millions l'an dernier, va maintenant devoir relever un triple défi. Le premier est de parvenir à élargir son marché. Vendre par Internet un objet dont le prix moyen est d'un peu moins de 2.000 euros n'a rien d'évident. Pour un tel prix, le client veut souvent « toucher ». Pour cela, le groupe investit dans son site Web et ses « call centers ».« Mais on ne va pas ouvrir de showroom ou de boutiques »,affirme Frank Aldorf, un Allemand qui a travaillé plusieurs années pour le concurrent Specialized. Pour lui, investir dans un réseau de boutiques serait une erreur. Cela augmenterait les coûts et ferait perdre sa spécificité à la marque. La priorité est plutôt de développer le service et la qualité des vélos, car, même si monter roues, pédales et guidon lorsque le vélo est livré par UPS n'a rien de compliqué, les acheteurs doivent être aussi un peu bricoleurs, l'un des inconvénients de Canyon étant que la distribution traditionnelle refuse très souvent de réparer ces vélos vendus par le diable. « C'est dommage car Internet est moins menaçant pour eux que pour les libraires. Leur avenir est dans le service », analyse Rodolphe Beyer, qui pense que d'autres finiront comme Canyon par miser gros sur la vente directe. Certains fabricants traditionnels, qui s'inquiètent de la montée en puissance de Canyon, testent déjà la vente en direct de certains vélos. Mais ils se limitent à des séries limitées, de peur de se mettre à dos leurs revendeurs.
Des réparateurs itinérants
Le deuxième défi pour ce précurseur souvent boycotté par les magasins spécialisés est donc de rassurer les clients, qui s'inquiètent du service après-vente. Pour l'instant, Canyon propose des révisions tout compris à 120 euros, mais cela impose de renvoyer son vélo dans une boîte, ce qui n'a rien de pratique. Pour faire face à la réticence des boutiques spécialisées, qui semble plus prononcée en France que sur d'autres marchés, Canyon tente de convaincre par le dialogue. Mais le groupe envisagerait aussi de former et d'aider des réparateurs indépendants à se lancer avec des camionnettes qui iraient directement chez les clients. Pour servir les 100.000 Canyon qui roulent en France, il suffirait sans doute d'une vingtaine de ces réparateurs itinérants, qui rendraient, en fin de compte, un meilleur service que les boutiques traditionnelles !
Le dernier défi pour Canyon est industriel et international. Même si quelques Asiatiques commandent des Canyon, le groupe réalise encore 90 % de son chiffre d'affaires en Europe. Pour continuer de grossir, le groupe va devoir s'internationaliser en partant un jour à l'assaut d'un marché américain très exigeant en termes de services client. « On ne vend pas aux Etats-Unis, mais on y est déjà connus car la presse spécialisée parle de nous, et des Américains viennent ici à Coblence chercher des vélos qu'on peut récupérer sur place », explique Frank Aldorf, qui a quitté la Californie en début d'année pour revenir au pays et aider ce groupe encore bien plus petit que les géants américains ou l'asiatique Giant à changer de dimension. « Si on y va, ça sera une déclaration de guerre pour les Américains qui nous voient progresser et qui s'inquiètent », remarque Ward Grootjans qui, au-delà de la stratégie, gère l'internationalisation du groupe. Pour être en mesure de réussir sa mondialisation, Canyon ouvrira à l'automne une nouvelle usine ultrasophistiquée à 15 millions d'euros sur un terrain qui lui permettrait à terme de tripler de taille. « On s'est inspiré des techniques de production de l'industrie automobile et on pourra produire 450 vélos par équipe de huit heures », précise André Koch, ancien consultant de l'automobile, qui dirige l'aspect industriel chez Canyon. Le but est à la fois d'être capable de produire beaucoup plus, beaucoup plus vite, « mais aussi de pouvoir répondre aux attentes de personnalisation des clients », qui souhaitent s'offrir du sur-mesure au prix du prêt-à-porter, explique André Koch. « Nos concurrents n'ont pratiquement plus de croissance, nous, notre problème, c'est de faire face à la demande. Et de rester lucides. On doit grossir mais pas trop vite. Avant d'être les plus grands, on souhaite avant tout être la marque préférée des cyclistes. Le plus important c'est de durer », avoue froidement Frank. Et peut-être, aussi, de gagner le Tour.
David Barroux, Les Echos
Les points à retenir
Canyon est né de l'imagination de deux frères, cyclistes amateurs, qui ont commencé par vendre des pièces détachées dans leur garage le soir après l'école. Le petit business se développe et, pour se différencier, fait le pari de la montée en gamme. Pour y parvenir, le groupe s'appuie sur une armée de chercheurs et d'ingénieurs. Canyon, qui commercialise ses deux-roues directement sur Internet, affiche des prix 30 % moins cher que les distributeurs classiques. Reste pour Canyon plusieurs défis à relever : le service après-vente, l'internationalisation et l'amélioration de son outil de production.
Le saviez-vous ? En ville, une voiture roule en moyenne à 14 km/h, alors qu'à vélo la moyenne se situe à 15 km/h !
L'évolution des trafics de voyageurs et de marchandises est marquée par une prépondérance de la route sur les autres modes. Il est nécessaire de favoriser la modification de la répartition modale des trafics au profit de modes moins polluants.
Cela concerne en particulier :
les « modes actifs », vélo et marche à pied, pour la mobilité courte distance ; jusqu’à 5 kilomètres, le vélo est plus rapide et supprime les problèmes de stationnement. En outre, 50 % des trajets en ville font moins de 3 km. Un cycliste roule en moyenne à 15 km/h en ville, contre 14 km/h pour une voiture ;
les transports publics, urbains ;
l’autopartage, le transport à la demande, le covoiturage ou tout autre service de mobilité innovant ;
les transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, combinés ou non pour les transports de marchandises.
Les modes actifs sont la façon la plus naturelle de se déplacer car ils utilisent nos propres ressources et notre énergie pour le faire. La marche à pied et le vélo permettent de se maintenir en bonne santé et préservent l’environnement. Ils sont plus rapides sur de courtes distances.
La marche à pied
C’est le mode de transport universel. Il ne nécessite pas de place de parking. Il est gratuit, bon pour le moral, le cœur, les jambes, les artères…. La marche est performante là où une voiture ne l’est pas (temps de démarrage, de stationnement). Les centres-ville sont de plus en plus nombreux à comporter des zones piétonnières et des « zone de rencontre » où la vitesse des véhicules est limitée à 20 km/h et la priorité donnée aux piétons : ils peuvent y circuler aussi bien sur les trottoirs que sur la chaussée.
Le vélo
Rapide, pas cher, non-polluant et bon pour la santé, le vélo a beaucoup de qualités. Sur des distances inférieures à 6 km, il est très performant en ville et s’y développe de façon spectaculaire. Comme la marche à pied, il maintient en forme, et permet une moindre exposition à la pollution que dans un espace confiné comme l’habitacle de la voiture. Économique à l’achat, il l’est aussi à l’usage. Il ne prend pas beaucoup de place et demande des investissements publics ou collectifs modestes : pistes cyclables, locaux à vélo dans les immeubles, parkings à vélo.
Dans toutes les grandes villes, on trouve des stations de libre-service de vélos, souvent en liaison avec les réseaux de transports en commun ou les parkings. L’aménagement ou la création en site propre de voiries urbaines pour le vélo se généralise, ainsi que l’aménagement de zones dédiées au stationnement des vélos en ville et de parkings à vélo sécurisés près des gares.
Le jeudi 9 juillet à 10 h, la passerelle en estacade de la voie verte sera posée. Rendez-vous à l’angle de la rue Moser et du quai du Rhin, derrière l’usine BASF (plan d’accès joint). Possibilité de photographier et filmer cet aménagement.
Le 13 avril 2015 ont démarré les travaux d’aménagement de la seconde section de la voie verte (piétons, cycles) le long du Rhin, de la frontière franco-suisse jusqu’au quai du Rhin à Huningue.
Le 8 juillet, le chantier est entré dans sa phase la plus spectaculaire avec la pose des deux premiers éléments de la passerelle en estacade. D’une dimension de 26 mètres de long et 3,45 mètres de large, ces éléments en aluminium seront progressivement posés sur des appuis en béton. Au final l’ouvrage mesurera 182 mètres de long.
Une première section de la voie verte Bâle-Huningue, située en zone urbaine, a d’ores déjà été réalisée à l’automne 2014 du côté des quais de la République et du Rhin.
A terme, la voie verte s’étendra de la frontière suisse à la Passerelle des Trois Pays, permettant de relier la France, la Suisse et l’Allemagne en moins de 2 km. Elle améliorera les liaisons domicile-travail entre le centre de Bâle et le campus Novartis.
Ce projet porté par le Conseil départemental du Haut-Rhin revêt une dimension à la fois environnementale (dépollution des berges du Rhin), sociale (voie partagée vélos, piétons, rollers) architecturale et paysagère (valorisation d’une friche délaissée en une « promenade » aux abords du Rhin).
La voie verte est cofinancée par l’Union Européenne-Fonds Européen de Développement Régional (FEDER) – dans le cadre du programme INTERREG IV Rhin Supérieur «Dépasser les frontières, projet après projet ». Le partenariat rassemble des intervenants internationaux (Europe-Interreg IV Rhin Supérieur Confédération Suisse-Canton de Bâle Ville), des collectivités locales de plusieurs niveaux (Conseil départemental du Haut-Rhin, Conseil régional d’Alsace, Communauté de Communes des Trois Frontières, Ville de Huningue), des institutions (Chambre de commerce et d’industrie-Ports de Mulhouse-Rhin, Voies Navigables de France et l’entreprise Novartis) ainsi qu’IBA Basel 2020.
Le "PAMA" : Est un dispositif du Ministère des Transports « Plan d’action pour les mobilités actives » présenté en mars 2014 par l'ex ministre Frédéric Cuvillier. Ceplan a été largement débattu au congrès mondial du vélo Velocity, à Nantes par Alain Vidalies, son successeur secrétaire d’État.
Le décret contient plusieurs autres mesures qui visent à faciliter les déplacements à pied et à vélo. Elles avaient été discutées courant 2013 et début 2014 par le cabinet du ministre, les services de l’État, le CVTC et les associations représentant les piétons et les cyclistes, notamment la Fédération des usagers de la bicyclette.
Pédaler au milieu de la rue. Désormais, les cyclistes ne sont plus tenus de respecter « le bord droit de la chaussée ». Ils peuvent donc légalement rouler au milieu de la rue lorsqu’elle est en sens unique, ou de la voie lorsque la rue est en double sens. Pour ennuyer les automobilistes qui appuient sur le champignon derrière eux ? Non ! Pour se prémunir d’une ouverture intempestive d’une portière.
Par ailleurs, le décret « Pama » généralise les « double-sens cyclables » dans l’ensemble des voies limitées à 30 km/h, et non plus seulement dans les zones 30. Ainsi, même une rue isolément limitée à 30 pourra être empruntée à vélo dans le sens inverse de la circulation automobile. Là encore, il ne s’agit pas de brimer les automobilistes, mais de favoriser les déplacements à vélo. Et ce type d’aménagement est sans danger, contrairement à une idée reçue.
Les sens interdits, faut-il le rappeler, avaient été imaginés et largement généralisés pour « fluidifier » le trafic automobile. Les autres mesures constituent essentiellement des points techniques et juridiques qui permettent aux services des municipalités de régulariser des pratiques déjà courantes ou de se protéger juridiquement.
C'est pas gagné. Reste désormais aux villes, et le cas échéant aux polices municipales, à verbaliser les contrevenants. Ce n’est pas gagné. Une élue d'une ville de 30000 habitants confiait récemment, sous le strict sceau de l’anonymat : « lorsque je me plains des voitures garées sur les pistes cyclables à l’adjoint en charge de la sécurité, il me répond qu’on ne va quand même pas embêter les gens ».